Compte-rendu 2014

Le 20° Rallye Aéro France : Espagne et Portugal

Récit de trois pilotes de l’ACAM à bord du C 172 – F HAAM – 28 mai au 9 juin 2014
Le RALLYE AERO-FRANCE propose aux pilotes privés, chaque année depuis vingt ans, un voyage en VFR à travers l’Europe ou le Bassin méditerranéen. Il allie la passion de l’aviation et la découverte des lieux visités – sa vocation culturelle est sans doute la plus marquée parmi les rallyes organisés en Europe.
Après avoir retenu à maintes reprises l’Espagne et le Portugal, au début, dans les années
1990 et 2000, le Rallye a repris cette direction pour son vingtième anniversaire mais d’une
manière différente en 2014, en survolant « le trait de côte » depuis Royan à 1 000 pieds
QNH. La requête déposée à cet effet auprès des instances aéronautiques concernées fut
acceptée sans amendement. Nous avons même été gratifiés de la publication d’un NOTAM,
dans les deux pays, sur notre passage un peu « particulier » – onze avions au total.
Alors, tout commence par le survol à partir de Royan de l’estuaire de la Gironde, du bassin
d’Arcachon et de la dune du Pyla avant de s’engager dans cette ligne droite que sont les
plages de la côte landaise et sa forêt de pins avant d’arriver à Biarritz. Du moins, pensions-nous atteindre le terrain mais la météo en a décidé différemment. D’où, une escale
intermédiaire à Arcachon avant de partir le lendemain dans des conditions plus propices1
.
Après avoir croisé Biarritz sans s’y poser, nous passons Saint-Jean-de-Luz avec ses belles
demeures et hôtels au-dessus de la mer. Le passage de Biarritz à San Sébastian est très bref avec des changements de fréquences, points de report et passage FIR qui ne vous laissent finalement guère le temps d’apprécier. Avant même d’atteindre le Pays basque, si la météo le permet, à l’horizon, la chaîne des Pyrénées se profile avec ses reliefs chapeautés par les nuages ou sa neige étincelante. Notre cap à partir de San Sébastian évolue au 270° et s’adapte au découpage de la côte.

A notre gauche, bordant la mer, la Cordillère Cantabrique que nous longerons sur 480
kilomètres. Les reliefs culminent à 2 600 mètres… Nous quittons le Pays basque après des
contacts avec Bilbao, Santander et atteignons le terrain d’Asturias après 2h 40 de vol. La
navigation est particulièrement aisée, le plus redoutable sur cette côte s’avérant la météo.
En effet, il pleut selon ses habitants un jour sur deux – les paysages sont verdoyants et…
notre arrivée se déroula en VFR Spécial dans les derniers Nautiques.
1 Au passage, signalons que Royan et Arcachon sont deux étapes que nous recommandons.
Royan, où nous avons déjeuné, est sans taxe, avec un restaurant et une pompe essence
Total H24 automatique. Arcachon, taxe de 11 €, sans restaurant, avec une pompe Total H24 automatique où l’accès est circulaire sans donc la contrainte de pousser l’avion… L’AFIS dispose de tous les moyens en informations avec un accueil « service commercial »
irréprochable. Le rassemblement des onze équipages est donc fixé à Asturias, terrain en proximité de l’Océan. C’est un aéroport international actif sur l’Europe et bien desservi par les lignes intérieures. Le trafic est donc soutenu et s’est bien développé depuis mon dernier passage en 2006.
Notre parking, réservé depuis des mois, est à l’écart des commerciaux ce qui nous oblige à
« prendre le Pédibus » pour se rendre à l’aérogare. Le handling est possible mais nous
l’avons évité en raison de son coût prohibitif (150/200 € par avion et non négociable). La
taxe d’atterrissage avec le parking sécurisé pour 24h est de 35 € par avion – météo et plan de vol inclus. Pour la météo, le coût est de 0,35 cts par avion et il en sera ainsi sur tous les
aéroports espagnols.
Nous passons l’après-midi à visiter la région et la nuit à Giron. Dans le programme des
visites notamment, une cidrerie – la région produit beaucoup de cidre qu’elle n’exporte pas.
C’est un cidre amer qui s’oxyde très vite à l’air. Sa dégustation est très étonnante. Un tour de ville et de la campagne avant de rejoindre l’hôtel.

Vendredi 30 mai : Asturias / Vilar de Luz
Départ tôt en direction de Vilar de Luz au nord du Portugal à proximité de Porto
International. Bien que le décalage horaire nous soit favorable (moins une heure par rapport
à la France), nous rejoignons Vilar de Luz par la côte soit 280 Nm, environ 2h 45 de vol selon les vents ! Ici, pas de taxe d’aéroport ou de handling.
Avant d’y parvenir, nous passons travers La Coruna par le Nord. La côte est toujours verte
avec un relief moins élevé toutefois. Le passage de la pointe de la Corogne, c’est-à-dire
l’extrême nord de l’Espagne, est particulier. On y trouve régulièrement des turbulences,
parfois sévères, accompagnées par du cisaillement de vent que nous expliquons par un vent du nord-ouest qui se sépare, pour une partie, en se glissant le long du relief vers le sud et l’autre partie se heurtant au relief sur la partie nord. Néanmoins, lors de notre passage, Eole s’est montré bienveillant avec nous. Cette région est très jolie avec ses nombreuses îles peu ou pas habitées. Avant de passer le point FIR AGADO entre l’Espagne et le Portugal, nous survolons une zone naturelle réglementée avec de nombreuses petites îles que nous évitons ce qui nous amène à faire des zigzags, puis arrive Vigo avec son estuaire. Bien avant d’atteindre Porto, nous découvrons une urbanisation côtière importante depuis Vigo avec un transfert des populations issues des campagnes alentours. La construction d’autoroutes se développe et accentue le phénomène.
Enfin, arrivée à Vilar de Luz qui est un aérodrome que les Fonds européens n’ont pas encore aidé mais c’est pour bientôt ! La piste de 1 400 mètres en bitume est réduite à 900 mètres par un seuil décalé et c’est bien dommage. Le taxiway est parallèle à la piste sur toute la longueur ce qui épargne de la remonter. Le parking est immense. Les installations en béton laissent imaginer qu’il y a eu jadis une belle activité – dans les années 50 ? Depuis, il est utilisé par l’aviation légère qui y survit au fil des années.
Pour l’occasion, un ancien Contrôleur, rencontré il y a 17 ans et prévenu de notre escale, est venu nous accueillir avec sa radio portable. Sitôt quitté l’Approche de Porto, il a pris sous sa responsabilité le Contrôle – tout s’est très bien passé. Il fait un soleil radieux et un vent assez fort génère des turbulences en finale.
Au programme, visite de Porto, de ses caves et, bien sûr, dégustation du vin de Porto blanc
et rouge. Une croisière sur le Douro clôt l’après-midi après une promenade en ville et sur les quais. Dîner et logement à Porto. 31 mai : Vilar de Luz / Cascais
Départ vers Lisbonne distante de 180 Nautiques en compagnie d’un vent annoncé à 35 Kts
et « windshear » à Lisbonne/Cascais au seuil de piste 35, méfiance donc. Avant le départ de Vilar de Luz, chaque avion reçoit son code transpondeur qu’il est tenu d’afficher au « holding point » car c’est l’Approche de Porto qui gère les départs. Le décollage effectué, l’Approche nous propose un virage à droite pour le survol de la ville, à notre grande, et agréable, surprise. Option souscrite, cela va de soi ! Nous découvrons, depuis le ciel cette fois, le Douro et ses ponts – la carte postale de la ville vaut le détour malgré quelques turbulences.
Nous rejoignons ensuite l’ADF Papa Golf au sud de la ville, source de tous nos calculs si nous avions suivi le cheminement préparé. Une telle invitation ne se refuse pas. Un grand merci est adressé aux Contrôleurs de la part de l’organisateur…
En se dirigeant vers Lisbonne, le relief s’estompe, la nature est moins verdoyante, la côte est rectiligne comme dans les Landes jusqu’à Figuera. Nous survolons l’aérodrome de Nazare, toujours à 1 000 pieds QNH… Lisbonne Info s’exprime dans un anglais lent.

Après Figuera, point de report Peniche, survol de Sintra, aérodrome côtier avant de prendre la photo symbolique de la Pointe de Cabo, surmontée d’un phare majestueux, marquant l’extrémité occidentale de l’Europe continentale. Puis, nous arrivons très vite sur Cascais. En longue finale, nous découvrons Lisbonne à droite de l’estuaire du Tage. Nous abandonnons ce panorama un instant pour se concentrer sur l’atterrissage car le cisaillement de vent annoncé doit accroître notre vigilance.
Nous restons deux jours à Lisbonne. Visites de la ville de Sintra et son Palais, de Lisbonne
avec son tram historique et dégustation obligée de la célèbre Pâtisserie Belém qui date de
1870 ! Entrée au monastère des Hiéronymites.
Notre séjour se termine par une soirée Fado.

Une nuit bien courte s’en suit car le lundi 2 juin, nous partons très tôt pour Séville où nous
perdons 1 heure sur GMT mais peu importe, le vol promet d’être beau et nous profitons
toujours d’un ciel bleu. La température depuis Asturias est remontée, on ne va pas se
plaindre mais le bus climatisé est apprécié.

Lundi 2 juin : Cascais / Séville – 272 Nm soit 2h 45 de vol
Le départ de Cascais n’est pas plus compliqué que d’habitude mais le Contrôle impose un
« slot » au moment de la mise en route. Toute l’escadrille du Rallye passe avec l’Approche de Lisbonne atteignant 500 pieds et se reporte après sur la côte. Avant-dernier dans l’ordre des décollages, F-HAAM est autorisé à 9h 33 à rejoindre les airs. Notre sortie se fait par le cheminement « Cape Espichel » et « Sétubal », les Portugais ayant accédé à notre désir de longer le rivage marin. Et pour une fois, onze avions passent sur le trait de côte en basse altitude sous le faisceau d’approche de Lisbonne International !
Navigation ensuite vers Sines au cap 180° jusqu’à la pointe « Vincente » puis le 090° vers
Villamoura et Faro. A partir de Portimao, l’urbanisation se développe. Beaucoup de villas
avec chacune une piscine, de petites plages au pied des falaises ou dans une crique se
détachent avec déjà des touristes affairés au bronzage de bon matin car l’après-midi, il doit y faire chaud. Les plages sont sauvages. A l’horizon, la forêt a disparu par endroit, sans aucun doute par des feux – pour reprendre vigueur, il lui faudra quelques années…

Faro, 70 000 habitants, est contournée par le nord de son aéroport mixte, civil et militaire. Le survol de la ville, bien concentrée dans sa forme, n’apporte rien à la carte postale :
Nous quittons le Portugal au point FIR MINTA sur le bord de mer, cap au 090° vers Séville et toujours à 1 000 pieds. La région a eu un « coup de chaud ». Même avant de quitter le
Portugal, la végétation demande visiblement de l’eau même si la rivière Guadalquivir arrose
les cultures de fruits et légumes Bio, une spécialité locale.
Nous arrivons à Séville vers 11h 45. Pas de trafic vraiment ce qui nous fait récupérer du
temps sur le retard pris au départ. Nous visitons la ville, la cathédrale, l’Alcazar, le quartier
de Santa Cruz, la place d’Espagne, le parc Marie-Louise et une émouvante soirée Flamenco clôture vers les minuits notre séjour.

Mardi 3 juin : Séville / Cordoue – 56 Nm soit 30 minutes de vol
Le temps de rentrer et sortir les trainées, nous sommes arrivés !
Ma tablette s’est mise en sécurité ce qui veut dire que la température atteint déjà les 30°.
Cordoue est en auto-information. Le carburant se fait à la pompe fixe où chacun prend sa
place dans la file d’attente en gardant calme et patience – les « caractères » peuvent
s’échauffer, je le dis pour l’avoir vécu. Nous faisons les pleins complets pour éviter une perte de temps sur les étapes à suivre. Les formalités sont fastidieuses voire « rétrogrades » dans le cadre pourtant de Schengen – chacun devant justifier son emploi alors plus on écrit, plus on s’occupe… Ici, c’est papier, crayon de bois et gomme – même si c’est peut-être parfois plus rapide que l’informatique et ça fonctionne toujours !
Départ vers la ville, déjeuner Tapas dans un restaurant typique comme on aime puis visite de la cathédrale/mosquée (début de la construction en 783 et fin en 1523) d’une superficie de 25 000 mètres carrés et capable de contenir 20 000 personnes. Cette cathédrale qui, à
l’origine, était une mosquée, est contestée depuis quelques années par certains musulmans – c’est même un « point » assez chaud selon notre guide.

Mercredi 4 juin : Cordoue / Grenade – 72 Nm soit 40 minutes de vol
A l’horizon, la Nevada encore recouverte de neige (3478 mètres, longueur de 100 Kms et
largeur de 50 Kms). Survol des grands lacs et du Rio Genil, un affluent du Guadalquivir.
Grenade est située dans une cuvette propice aux orages où il est préférable de se poser le
matin plutôt qu’en fin d’après-midi.
Visite incontournable des Jardins de l’Alhambra avant l’Albaycin, le Palais Charles V et
l’Alcazaba ainsi que la ville et ses innombrables rues étroites.
Nous ne manquons pas de prendre une assiette de jambon avec une bière pression.

Jeudi 5 juin : Grenade / Madrid Cuatro Vientos – 210 Nm
Nous prenons un cap 350° pour rejoindre Tolède, point d’entrée du corridor de Madrid
Cuatro Vientos. La météo est toujours souriante, pas de nuage, un peu de vent du Nord,
faible turbulence sur le relief qui, au départ, est de 5 000 pieds. Il y a lieu de monter vite une fois quitté l’axe de décollage à Grenade.
Il y a parfois des surprises lors de nos voyages même si la préparation est très minutieuse. En effet, à quelques Nautiques de notre destination, la TWR annonce la fermeture du terrain pour des entraînements militaires – et même plus « grave », de la radio puisqu’elle cesse de répondre. Onze avions qui régulièrement – plan de vol, NOTAM pris – se préparaient dans le corridor d’approche à l’arrivée sont livrés à leur propre initiative. Finalement, le nom d’un terrain de déroutement circule entre les avions : Casarrubios del Monte, certes sur notre route mais non prévu en déroutement lors de la préparation du vol. Piste 950 mètres, terrain réservé à l’aviation légère, en auto-information. Bref, tout s’est bien déroulé… mais au mécontentement des Espagnols locaux que nous avons dérangés dans leurs habitudes !
Puis, nous rejoignons Madrid en une heure de bus laissant nos avions sur place après les avoir bien arrimés.

Madrid, du 5 au 7 juin, avec au programme le musée du Prado, San Lorrenzo de l’Escorial, visites des monuments et fin de séjour madrilène par un dîner de Gala au Réal Aéroclub de Madrid avec son Président.

Dimanche 8 juin : Madrid / Salamanque – 90 Nm et un peu moins d’une heure de vol
Toujours sous un ciel bleu, décollage à la fraîche, visibilité supérieure à 10 kilomètres.
Salamanque est une ville universitaire. Son aéroport est mixte, civil et militaire, aux allures
fantômes. Ici, les consignes sont strictes avec les militaires. J’ai toujours connu cet aéroport
comme étant compliqué malgré l’absence de trafic.
La ville est belle à découvrir, le centre-ville avec sa plazza Major, la nouvelle cathédrale, une journée bien remplie.

Lundi 9 Juin : départ vers Angers
Nous transitons via Burgos, Vittoria, San Sébastian au FL 55 et toujours sous un ciel bleu.
Escale à Arcachon pour un complément d’essence avant de rejoindre Angers… toujours sous un ciel bleu – la Météo avait annoncé une « vigilance orange » sur le quart Sud Ouest de la France…

Quelques enseignements et conseils à retirer de ce voyage, pour terminer :
Les « plus » du voyage, toutes les visites avec un guide conférencier professionnel et le
survol des côtes à 1000 pieds QNH.
Bien préparer les escales sinon les coûts pour le transit peuvent atteindre des sommes
importantes.
Bien lire les AIP, sinon on peut rester longtemps sur le tarmac !
Pour information,
TVA en Espagne 21%
TVA au Portugal 23%
Carburant : avoir une carte de pétrolier comme BP présent sur la majorité des aéroports ou
du cash. La Carte bancaire n’est pas acceptée malgré le logo qui figure sur les cartes VAC.
La préparation demande 6 mois minimum.
Aujourd’hui, il faut tout calculer y compris le trajet entre l’aéroport et l’hôtel comme le
temps de passage à la Police, même en Espace Schengen et faire preuve de patience en
conséquence . . .
Rédaction : Jean Michel Collineau et Didier Cariou
Crédit photos : Joël Mortreau